Effets indésirables du confinement : ces experts qui sonnent l’alarme (partie 1)

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Engendrant une grave récession, un chômage massif et de nombreuses privations de libertés, un confinement prolongé pourrait avoir des conséquences désastreuses sur la santé publique et la paix civile à travers le monde. En France, cette politique décidée dans l’urgence a déjà des effets délétères sur la sécurité intérieure, comme on peut l’observer dans les banlieues. Elle entraîne également une progression alarmante des insomnies et des troubles psychologiques chez nos concitoyens. Face au tsunami socio-économique qui menace l’humanité, différents spécialistes des questions de sécurité et de santé publique sonnent l’alarme. Sans pour autant remettre en cause l’utilité de ces mesures de confinement – qui ont permis de sauver des milliers de vies et de limiter la propagation de ce virus –, il est indispensable de réfléchir à une sortie progressive de ce régime d’exception afin qu’à terme, le remède n’ait pas de pires effets que le mal. Mais avant, posons d’abord le diagnostic.  

 

L’humanité traverse une période difficile et incertaine, qui nécessite un grand effort de lucidité, de sagesse et de rationalité. Alors que beaucoup d’entre nous sont confinés, et soumis à une avalanche d’informations angoissantes et d’injonctions paradoxales, le climat d’hystérie collective qui en résulte ne facilite ni le débat, ni la prise de décision éclairée. Or, il nous faut être réalistes, sans pour autant sombrer dans le catastrophisme : à terme, les effets indésirables de ce confinement – s’il se prolongeait sans être allégé avec intelligence –, pourraient être pires que la maladie elle-même. Nous allons vous expliquer pourquoi. 

 

En France, une explosion des signaux faibles inquiétants

 

Selon une source bien informée au sein du sytème médico-social français, depuis plusieurs décennies, « le contexte a rarement été aussi anxiogène pour la population, en particulier pour les jeunes. Aujourd’hui, 70% de nos concitoyens de 18 à 30 ans se disent inquiets pour leurs proches. 41% de ces jeunes subissent une baisse de moral, et 33% seraient prêts à enfreindre les règles du confinement pour préserver leur santé physique et/ou mentale. » L’on peut notamment observer des tensions croissantes dans les banlieues, qui s’expliquent en partie par l’effondrement des recettes issues du trafic de drogue. Les experts que nous consultons ne cachent pas leur extrême inquiétude vis-à-vis de ces quartiers, où l’on assiste à une multiplication alarmante des violences urbaines. « Nombre de mes collègues ne comprennent pas qu’on leur ordonne d’éviter l’affrontement dans les banlieues », note ce haut-gradé ayant requis l’anonymat. « Or, les remontées du Renseignement territorial sont effrayantes : l’effondrement de l’économie parallèle affecte des milliers de familles, et les restrictions de mouvement dans certaines zones urbaines densément peuplées font monter la pression. J’ignore si l’on pourra retenir longtemps “le couvercle”. »  

 

Précisons alors que les habitants des banlieues ne sont pas les seuls à mal vivre ce confinement. Toujours selon notre source médico-sociale, « actuellement, 44% des salariés français déclarent ressentir des troubles psychologiques, y compris ceux en situation de chômage partiel ou en télétravail – soit 10% de plus qu’avant le confinement. Si cette situation se prolonge quelques semaines, l’on pourrait observer une explosion des troubles psychologiques sévères dans notre pays. » Cet avis est partagé par de nombreux psychiatres, comme l’a rapporté Le Figaro le 13 avril dernier : « Les Français sortiront-ils indemnes, sur le plan psychique, du long confinement qui, depuis la mi-mars, s’impose à eux ? Si l’aréopage d’experts qui conseillent le gouvernement dans la lutte contre l’épidémie ne comporte pas de psychiatres, ces derniers n’ont pas manqué de s’emparer du sujet. Et leurs premières conclusions dessinent un tableau inquiétant… Certes, les Français comprennent la nécessité du confinement, et le besoin de le prolonger. Mais ils en souffrent : 74% des adultes rapportent des problèmes de sommeil, dont la moitié est apparue avec le confinement, et 37% présentent des signes de détresse psychologique, selon (…) l’enquête Coconel, menée par un consortium de chercheurs » entre fin mars et début avril. Nul doute que la communication désastreuse de notre gouvernement ne peut qu’aggraver ces tendances. Multipliant les injonctions paradoxales et les déclarations mensongères, nos autorités tentent de faire de « la gestion de pénurie » – comme l’a récemment expliqué le criminologue Alain Bauer. Hélas, cette situation préoccupante n’affecte pas seulement la France. 

 

Les alertes sur le confinement et la crise socio-économique qu’il engendre

 

Ces derniers jours, d’aucuns se sont moqués de ces « rednecks » pro-Trump qui exigent de ne plus être confinés. Sur les réseaux sociaux, ils ont même été comparés aux morts-vivants de la série Walking Dead. Or, il faut comprendre que cette tendance est mondialement observable, à mesure que les privations de libertés sont mal vécues par un nombre croissant d’êtres humains. Comme l’a récemment souligné l’économiste Charchai Parasuk, « dans plusieurs villes et pays du monde entier, vous avez pu constater dans les médias (…) une série de manifestations contre le confinement. Aux États-Unis, ces protestations ont touché vingt États fédérés. Elles ont également affecté le Brésil, l’Inde et même le Liban. »

 

Citant un article du prestigieux National Bureau of Economic Research (NBER), il précise qu’« un confinement total [sur le modèle actuel] entraînerait une contraction du PIB américain de 22%, tandis qu’une politique de non-confinement entraînerait une récession limitée à -7% du taux de croissance du PIB en 2020, mais avec 500 000 décès supplémentaires. D’après le résultat de cette simulation, l’on peut calculer que chaque vie sauvée équivaut à un coût d’environ 6,4 millions de dollars » rien qu’aux États-Unis. Bien entendu, si l’on ne peut que se réjouir de cette préservation de la vie, cette étude ne précise pas que ce confinement massif est avant tout la résultante de l’impréparation de nos dirigeants face à l’éventualité d’une pandémie. Or, l’impossibilité de mettre en place un confinement « intelligent », qui nécessiterait des dépistages massifs, une large distribution de masques et des quarantaines ciblées, pourrait avoir un impact catastrophique à tous les niveaux – et ce à long terme.

 

Comme l’avait écrit dans le New York Times le docteur David L. Katz, qui dirige le Yale-Griffin Prevention Research Centre, « je suis profondément inquiet car les conséquences sociales, économiques et sanitaires de cet effondrement quasi-total de la vie ordinaire – écoles et commerces fermés, rassemblements interdits –, seront durables et calamiteuses, peut-être même plus graves que le bilan direct du virus lui-même. La bourse va rebondir à un moment ou à un autre, mais de nombreuses entreprises disparaîtront. Le chômage, l’appauvrissement et le désespoir qui en résulteront seront des fléaux de santé publique de premier ordre. Pire encore : je crains que nos efforts ne contribuent guère à contenir le virus, car nous avons un système de santé publique sous tension, fragmenté et constamment sous-financé. La distribution de ressources aussi limitées, superficielles et aléatoires est la recette de l’échec. » Précisons que cette tribune a été publiée le 20 mars, alors que les États-Unis comptaient moins de 200 morts. Hélas, elle était prophétique car ce pays est actuellement le plus touché par cette pandémie.

 

Pour introduire son analyse, le docteur Katz fit une importante métaphore, qui illustre à quel point l’état de « guerre » déclaré par Trump et Macron maquille l’impossibilité, pour nos dirigeants, d’affronter intelligemment cette pandémie, à défaut de moyens, de compétences et de vision stratégique. Comme l’a rappelé cet expert, « nous distinguons systématiquement deux types d’actions militaires : d’une part, le carnage inévitable et les dommages collatéraux des hostilités massives et, d’autre part, la précision d’une “frappe chirurgicale” méthodiquement ciblée sur telle ou telle menace. Cette dernière méthode, si elle est bien appliquée, minimise les ressources employées et les conséquences indésirables. Alors que nous luttons contre cette pandémie de coronavirus, et que les chefs d’État affirment que nous sommes “en guerre” contre cette contagion, la même dichotomie s’applique. L’on peut donc mener une guerre ouverte – avec toutes les retombées qu’elle implique –, ou opter pour une réponse davantage “chirurgicale”. Jusqu’à présent, les États-Unis et une grande partie du monde ont choisi la première option », qui induit de sérieux risques sanitaires, économiques et sécuritaires sur le long terme.

 

Plus récemment, le professeur Jean-François Toussaint se posait des questions « à propos de l’isolement [forcé], qui a des effets contraires à la volonté de protection. Le deuxième effet [du confinement], beaucoup plus important, concerne la décision de ne pas consulter de peur d’attraper le virus. On voit des infarctus, des AVC, qui n’ont pas bénéficié de la prise en charge nécessaire. Tous ces éléments vont ressortir petit à petit. Il faut redonner une confiance suffisante à la population pour se dire que l’orage est passé. Il faut déterminer les politiques à partir de ce qu’on observe et pas seulement du risque maximal. On ne va pas dire que l’épidémie va durer jusqu’en 2026 si elle s’arrête au cours de l’été. » Le professeur Toussaint ajouta que « la responsabilité, c’est de trouver des réponses sanitaires, mais c’est aussi d’envisager la santé dans un cadre général, qui prend en compte l’interaction des milieux entre eux, la biodiversité, l’économie, l’écologie. Ces critères sont totalement absents des prédictions initiales et de la simulation de cette épidémie. Le monde économique se dit asphyxié, la culture dit qu’elle est en train de mourir, le monde sportif dit qu’on a brisé le rêve d’une génération en reportant les Jeux olympiques. Tous ces aspects doivent être associés et font peser des risques généraux sur la population. »

 

Dans un climat de peur généralisée, il n’est pas évident de s’émanciper du catastrophisme ambiant. Or, si nous sommes dans une situation d’urgence de santé publique, il est plus que jamais indispensable de nous poser des questions sur le bienfondé et la soutenabilité d’un confinement général à plus long terme. En effet, ces mesures induisent des risques sanitaires, économiques et sécuritaires majeurs, et nous venons de citer plusieurs experts qui s’en alarment fort légitimement. Ce diagnostic étant posé, nous pourrons étudier les différentes solutions possibles dans la prochaine partie de cette analyse.

 

Maxime Chaix 

 
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